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Des travaux récents tendent à considérer l’existence d’une version primitive datée de quelques années
après la liaison avec Diane Salviati en 1571 – 1573 (ms. 159). Une version revue pensant l’exile genevois
(ms. 157). Une partie de sonnets d’Hécatombe constituent une relique de l’aventure vécue, composées
plus tard. Des sonnets octosyllabes (27, 28, 33, 35, 36, 39, 41, 46) correspondent à la production
primitive avec la topique néo-pétrarquiste légère d’un amour policé. Mais l’argument métrique demeure
prépondérant, car les fureurs intempestives ont leur place dans les jeux de séduction.
Le Canzoniere est issu d’un très long travail de lecture et de relecture, de copie et de recopie, de correction
et de rajout poursuivi par un poète âgé, dont le regard décillé qu’il porte a posteriori sur ses « erreurs de
jeunesse » ne l’empêche pas d’en considérer les fruits avec une tendre amertume. Mais l’amour de Diane
ne saurait conduire à l’amour de Dieu. On rencontre dans l’Hécatombe un portrait du poète-amant en
jardinier qui, au-delà de la fable amoureuse conventionnelle, constitue une illustration obvie de ce
processus d’élaboration lente du recueil profane et de cette annulation des effets du temps sur le
sentiment amoureux. Son amour est pérenne.
2. « Les traces de mon perdu temps »
D’Aubigné fait de sa liaison avec Diane Salviati un événement fondateur, dur le plan sentimental (premier
amour) et sur le plan littéraire (premier recueil). Dans ses mémoires, Aubigné situe cet amour de jeunesse
entre 1571 et 1573, c’est-à-dire pensant les années qu’il a passé en pays blaisois, après la fin de la troisième
guerre civile. Il faut remonter à la paix de Saint-Germain (1570) qui a été favorable aux protestant, puis on
peut imaginer ce jeune soldat démobilisé. Avant d’être la réincarnation d’une déesse romaine aux mœurs
cruelles, la Diane que chante le poète est en effet une jeune fille issue d’une branche, émigrée en France à
la fin du XVe siècle, de la maison de sa naissance aux alentours de 1550, dans le château familial de Talcy.
Son grand-père, le banquier Bernardo Salviati, a fait l’acquisition en 1517 de la seigneurie et du château du
même nom, un château qu’il a réaménagé et fortifié dans les années qui suivent. Son fils va en effet
rapidement trouver en France des positions significatives dans des maison nobiliaires alliées et dans des
ordres influents :
• Jean : père de Diane, il est majordome ordinaire de la duchesse de Lorraine
• François : il est chambellan ordinaire du duc d’Anjou et premier écuyer de la reine de Navarre, et
chevalier de Malte et maitre de l’ordre de Saint-Lazare en France.
Avant d’accueillir les amours du jeune poète, le château a favorisé des entrevues politique. La
fréquentation du château avait des intérêts politique ou religieux. Il faut tenir en compte que Aubigné
entretien là sa réputation, et que cette idylle est aussi un moyen de parvenir tant sur le plan social que sur
le plan littéraire, puisque Diane, qui est la nièce de la Cassandre Salviati des Amours de Ronsard, fait figure
de muse pour celui qui entend bien mettre ses pas dans ceux de son glorieux ainé.
Dans les sonnets on ne retrouve aucune date ou époque précise ; ce particulier montre les règles de
naturalisation du discours de Pétrarque. Il y a des références à la scène de l’innamoramento, mais sans des
dates précises. Dans le sonnet 86 Aubigné situe la rencontre au moment du solstice d’été sans préciser
l’année.
Les épisodes évoques par le mémorialiste sont :
• La période heureuse de leur relation est liée à l’épisode qui voit le poète-soldat venir chercher une
hospitalité dans le château de Talcy (1572). Il commence à faire des projets de mariage, donc on
suppose que Jean Salviati a été séduit par la personnalité audacieuse du poète. Quant à la
différence de religion, elle ne semble pas créer d’obstacle.
• L’agression physique dont Aubigné dit avoir été victime dans une auberge (1572-1573).
• La rupture entre les deux, les conditions restent obscures probablement pour des questions
religieux (1573).
• Les amants se croisent d’une manière fortuite. Diane se montre mélancolique.
• La mort de Diane (1575)
Diane Salviati n’est pas seulement ce paradigme conventionnel qui donne à l’Hécatombe son allure de
Canzoniere amoureux, elle est un élément structurant du mythe personnel d’Agirppa. Plus qu’un souvenir
de jeunesse, elle est une présence obsédante, dont ne le guérit pas son mariage en 1583 avec Suzanne
Lezay.
3. « Et ces frases subornées / D’un Pétrarque ingénieux »
La femme réelle désigne la déesse (Diane-Artémis), la déesse qui exige l’hécatombe (le sacrifice d’une
centaine de victime) et l’hécatombe qui détermine enfin un nombre (la centaine), dont la nécessité fait loi.
Suivant le règles de l’autofiction pétrarquiste (une forme de fiction poétique nourrie de l’expérience
individuelle, qui permet à l’auteur de parler de soi) l’Hécatombe met en scène un poète-amant identifié à
l’auteur. Le poète réaffirme à intervalles réguliers non seulement son pouvoir d’immortaliser celle qu’il
chant, mais aussi la supériorité de la poésie à l’égard des autres arts de représentation. L’expression
littéraire du sentiment amoureux est bien partie prenant dans la relation qu’entretiennent les amants
supposés. En témoigne ce rêve utopique de réconciliation sentimentale autour du livre, qui permet de
comprendre que l’idéal d’un amour partagé va de pair avec la culture commun d’un jardin fructueux, qui
renverse la représentation du champ sanglant. L’amour se fonde sur un néo-platonisme littéraire de
circonstance, mais prédominent dans le livre les plaintes, les récriminations, les condamnations et les
attaques violentes. Cette violence irrépressible trouve son écho dans les campagnes militaires. Il
revendique une forme de brutalité, dans le maniement des « pistolles » et des vers. L’opposition entre le
sentiment feint et le sentiment authentique se double d’une opposition chère à Aubigné entre le
raffinement du style et l’expression naturelle et spontanée.
On retrouve l’expression traditionnelle de la souffrance d’aimer, qui se traduit par des mouvements de
révolte à l’égard de la nature. Il y a même tous les métaphores lexicalisées à partir du feu et du sang. Le
cœur est l’organe sensible liée au sacrifice amoureux. L’amant situe la passion dans le cadre d’une
pathologie mentale, en faisant valoir la perte de la raison et du sens qui provoque un amour destructeur.
Célébrant sa propre destruction, il intègre la part de satisfaction qu’il y a à souffrir.
Diane est une triple figure :
• Diane chasseresse : elle a le rôle-titre
• Hécate infernale
• Séléné nocturne
La figure de Diane donne lieu à un travail de représentation qui occupe une partie importante du livre. Ses
qualités physiques relèvent un travail de stylisation fondé sur les canons traditionnels de la beauté
féminine. L’éloge n’est conduit pas au portrait, mais il s’applique à un corps morcelé en de multiples parties
significatives (la chevelure, la bouche, l’oreille et la main). Le discours amoureux ne peut que constater la
métamorphose de l’amie bienveillante en une ennemie malfaisante. Depuis le moment de la première
rencontre, il s’est passé un laps de temps impossible à préciser, où se sont déroulés différents épisodes qui
viennent globalement corroborer le récit du mémorialiste. Hécatombe ne répond pas aux normes d’une
narration chronologique. Dans ce livre le passé heureux ce n’est pas celui qui précède la rencontre fatale,
comme chez Pétrarque, mais celui qui précède le revirement brutal de Diane. Ces sonnets offrent une
représentation assez conforme des rituels de séduction et des modes d fréquentation prénuptiale à la
Renaissance. Le parc de Talcy, qui sert de refuge pouvant préserver l’intimité du couple des regards
indiscrets, tient à cet égard une place privilégiée. Plutôt que de nous apprendre comment Agrippa
d’Aubigné a aimé Diane Salviati, le recueil nous permet de comprendre un peu mieux comment s’aimaient
les jeunes gens au sein des classes aisées. Il est sûr que les sonnets sont tributaires d’une pratique sociale
encadrée. Le poète, c’est le chant immatériel qui s’élève en direction de son objet, mais c’est aussi le papier
qui le fixe pour en permettre la circulation. Le lecteur de poésie lyrique est donc le destinataire second d’un
livre de sonnets.
Remarques sur la versification
Le sonnet c’est une forme semi-fixe composée de deux quatrains et d’un sizain. La tradition française
considère comme plus réguliers ceux qui se composent à partir d’une gamme de cinq rimes :
• Marotique : type italien. ABBA ABBA CCD EED
• Peletier du Mans : type français. ABBA ABBA CCD EDE
1. Disposition des rimes
Dans Hécatombe la disposition des quatrains sur deux rimes (AB) est régulière. En ce qui concerne le sizain,
Aubigné respecte la disposition régulière en faisant le choix du modèle à trois rimes, disposé à l’it