Indice
Présentation de l’œuvre
Le nom de Bossuet est lié surtout aux Oraisons funèbres. Il s’agit d’un genre littéraire que l’écrivain redoutait car il fallait faire l’éloge du personnage décédé, en évitant tout blâme que les parents et les amis du défunt puissent trouver pénible. Voilà donc le problème: comment, ans offenser Dieu, louer les Grands personnages de l’histoire dont l’ambition est un attribut naturel et constant et dont la liberté de vie peut souvent aller jusqu’à la licence et pour qui l’injustice est une tentation continuelle?Pour se tirer de cette difficulté, Bossuet a utilisé plusieurs moyens:
a) Il rend solide et ennoblit le discours d’apparat en lui donnant une valeur historique: ses héros sont placés dans le cadre des événements où ils ont joué un rôle et qui sont importants, puisqu’il s’agit de reines, et princes et des princesses ou de ministres.
b) Dans l’éloge funèbre il enlève les intentions purement flatteuses et il conçoit, par conséquent, ses biographies comme de véritables «histoires d’âmes».
c) Il fait tourner le panégyrique vers une leçon de morale chrétienne; pour cela, l’oraison funèbre est transformée en un véritable sermon.
Points de repère historiques présents dans les Oraisons
Bossuet peint le tableau de la Révolution anglaise et peint le portrait du roi Charles Ier et de Cromwell, dans l’Oraison Funèbre d’Henriette d’Angleterre, petite fille d’Henri IV; l’Oraison Funèbre de la Princesse Palatine, femme de Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV, est une occasion pour peindre le tableau de la Fronde; dans l’Oraison Funèbre de Condé, il esquisse le tableau de la bataille de Rocroi et de Fribourg, avec un parallèle entre Condé e Turenne.Ces portraits et ces narrations historiques ont beaucoup de lumière, de force et de mouvement; on y respire une atmosphère royale comme s’il s’agissait d’une épopée. De ce point de vue littéraire, les Oraisons Funèbres sont admirables, mais au point de vue historique, plus d’une fois, elles sont discutables. A force de chercher partout des manifestations de la Providence, Bossuet a ôté l’ énergie naturelle à un événement comme la bataille de Rocroi ou à un homme comme Cromwell. Les vraies causes de la Révolution d’Angleterre, que Bossuet croit toute religieuses, en réalité sont été politiques.
Bossuet concilie la vérité historique avec le panégyrique
Cependant, il est hors discussion que Bossuet a su concilier ses devoirs d’historien avec les nécessités du panégyrique funèbre.Tout d’abord il s’est documenté scrupuleusement: sur Henriette de France, il a consulté plusieurs mémoires de l’époque, il a consulté les lettres de la Princesse Palatine et les archives de la famille Condé, sans compter que très souvent, il a connu personnellement les personnages dont il parle. D’une façon très hardie, il laisse deviner, avec franchise, les démêlés conjugaux de Madame e de Monsieur, rappelle la dissipation de la Princesse Palatine et il fait allusion à la trahison de Condé. Naturellement ce ne sont que des allusions sur lesquelles il n’insiste pas trop car ces erreurs étaient très connues par les contemporains: il ne se contente que de les signaler.
Un exemple d’histoire d’âmes: L’Oraison Funèbre d’Henriette d’Angleterre
C’est ainsi que en lisant les mémoires et la correspondance du défunt et en interrogeant des témoins vivants, il arrive à composer de véritables «histoires d’âmes»: Henriette d’Angleterre, fille du roi et épouse d’un prince, jeune, jolie et intelligente, avait souhaité et méritait d’être aimé, mais le duc d’Orléans ne lui donna pas ce bonheur et la jeune femme se laissa, alors, prendre par la frivolité de la Cour. Toutefois ses qualités d’esprit, très solides, la préservèrent; elle fut la protectrice de Corneille, de Molière et de Racine. Bientôt, le roi utilisa son intelligence et il lui confia, avec succès, une mission diplomatique auprès de Charles II, roi d’Angleterre ce qui attira sur elle les attentions de tous les courtisans de Versailles.Mais, frappée par la mort, son âme se manifeste dans sa simplicité, sa noblesse et sa force. Elle apparaît donc une «héroïne chrétienne».
Identité Oraison Funèbre et Sermons
Chaque oraison funèbre de Bossuet est un véritable sermon pour lequel il emprunte des exemples à la destiné du personnage célébré qui devient, ainsi, un objet de méditation religieuse.a) L’oraison funèbre d’Henriette d’Angleterre se présente comme un sermon sur les devoirs des rois, à qui Dieu donne de grandes, mais terribles leçons et, en général sur la bonne et la mauvaise fortune, qu’il faut prendre d’une âme également chrétienne, comme l’a fait la reine, aussi admirable dans ses misères que dans le bonheur des premières années de mariage.
b) Cette oraison est aussi un véritable sermon sur la mort
c) L’oraison du prince de Condé est un sermon sur la pitié opposée à l’ambition. Condé avait d’incomparables qualité d’esprit et de cœur que Bossuet met en lumière. Mais sans la pitié, elles n’auraient servi à rien car sans pitié, le plus grand homme n’est que néant.
d) Tous ces thèmes convergent vers l’intention commune à tous les discours de Bossuet: dénoncer les excès et les dérèglements d’une société emportée par l’orgueil et lui enseigner que tout est néant et que les grands hommes sont, comme tous les autres, dans la main de Dieu; nous naissons tous voués à la mort et notre seule chance est de nous y préparer pour en faire le prélude de la vie véritable.
Le thème de la mort
L’idée de la mort, déjà présente dans le Sermon sur la Mort, caractérise les Oraisons funèbres. A ce propos, Il l’Oraison funèbre d’Henriette d’Angleterre e le Sermon sur la Mort traitent le thème de même manière.Bossuet écrit textuellement:
«Tout est néant en nous, si nous considérons les grandeurs humaines, mais tout est grandeur, si nous considérons nos devoirs envers Dieu».
Or, la princesse est le témoin vivant de cette double vérité car:
1. Tant de jeunesse, de grâce et de hautes qualités, tout cela est tombé anéanti prématurément d’un seul coup
2. Cette mort a été une grâce suprême pour la princesse que Dieu avait amenée à lui par des grâces successives; cette mort a arraché Henriette d’Angleterre aux tentations du monde qui pouvaient naître de ses qualités