Marivaux – Caractères de son théâtre

Marivaux – Caractères de son théâtre

Le XVIII siècle a compté de nombreux écrivains comiques : les uns, en suivant les traces de Molière, sont plus attachés à la satire des mœurs ou à l’exploitation des situations traditionnelles qu’à la peinture des caractères, les autres préfèrent rechercher du nouveau dans le genre moralisateur ou qui fait pleurer le public.
Le véritable rénovateur et créateur de pièces vraiment originales est Marivaux. Marivaux, vécu de 1688 à 1763, occupe une place à part dans l’histoire du théâtre français.

Son originalité consiste dans la création de la comédie amoureuse où l’amour occupe une très grande importance. On peut dire qu’il a réalisé dans la comédie ce que Racine a réalisé dans la tragédie. En effet, il a composé des pièces remarquables où l’amour est le thème unique, caractérisées par la simplicité du sujet et de l’action. Par exemple, dans la pièce Surprise de l’amour il met en scène un jeune homme et une jeune femme qui sont obligés de se voir pour une question d’affaires. Ils arrivent à s’aimer sans s’en rendre compte; enfin, ils le découvrent et ils avouent réciproquement leur sentiment. Dans l’Épreuve, une jeune fille aime un jeune homme ; au début, elle cache son sentiment, mais à la fin elle le laisse voir et le couple arrive à se fiancer. Dans Le Jeu de l’amour et du hasard, pour mieux étudier le jeune homme à qui elle est destinée en mariage, une jeune fille s’est déguisée en soubrette, tandis que le jeune homme, ayant eu la même idée, s’est déguisé en valet de chambre. Elle aime, malgré elle, le prétendu valet et, quand il lui révèle qui il est, elle s’écrie qu’elle voit clair dans son cœur.

Toutes les comédie de Marivaux sont faites de rien. La description des caractères des femmes est l’élément qui nous fait penser davantage à Racine: il s’agit de jeunes veuves ou de jeunes filles honnêtes et modestes, tendres et spirituelles, mélancoliques parfois et toujours gracieuses. Cependant, de grandes différences séparent Racine de Marivaux, a part, bien entendu, les différences essentielles entre la tragédie et la comédie. Marivaux a peint l’amour-tendresse qui conduit à d’agréables mariages et qui s’accorde pour toujours à la vie, tandis que Racine a peint l’amour-passion qui aboutit à une catastrophe, ou bien l’amour menacé ou l’amour victime. En outre, Marivaux met en scène un amour sincère et plein de vertu, alors que Racine avait peint l’amour violent dans un moment de crise aiguë ou en pleine angoisse. L’amour de Marivaux est très délicat et timide ; il craint de se révéler et il se crée lui-même des obstacles et qui il ne se découvre que malgré lui. Souvent des malentendus dévoilent le sentiment qui arrive après toute une série de cache-cache sentimental. Il s’agit, alors, de mettre en scène un mouvement psychologique très subtil et menu et surtout vrai.
Le style est approprié à cette psychologie grâce à toute une série de détours et de nuances. Évidemment on y retrouve des traces de la préciosité du XVII siècle, come dans le style de Racine. Parfois, il s’agit d’un style un peu trop raffiné que Voltaire avait appelé « marivaudage », mais qui, toutefois, reste inimitable.