Introduction
Au XVI siècle, on s’appuie sur l’autorité d’Aristote d’Horace e de Sénèque pour édicter les règles à suivre dans les représentations théâtrales qui seront codifiées par l’abbé d’Aubignac en 1657 dans son traité Pratique du théâtre. Une tragédie régulière et conforme aux règles doit être divisée en cinq actes et écrite en alexandrins, elle doit assurer la dignité de ses héros et respecter les trois unités. La règle de ces trois unités a été formulée par Boileau qui écrit:
«Qu’en un lieu, qu’en jour, un seul fait accompli. Tienne jusqu’à la fin le théâtre rempli.»
Les trois unités
L’unité de lieu exige que toute la pièce se joue dans le même décor. Corneille triche avec elle dans le Cid, où la scène se déplace à travers Séville; pour la respecter dans Horace, il dérange le Roi qui, invraisemblablement vient juger le jeune Horace dans la maison de son père; dans Cinna il ne maintient l’unité de lieu qu’en faisant se réunir les chefs de conjuration dans une salle du palais de l’Empereur et on peut, à juste titre se demander si cela n’était pas une imprudence.
L’unité de temps (24, 12 ou 6 heures, selon les théoriciens) cause des invraisemblances dans le Cid, puisque aucun mortel n’est de taille à accomplir tant d’exploit (deux duels, une bataille) sans prendre le moindre repos. Dans les autres pièces, elle est respectée d’une façon plus naturelle.
L’unité d’action, appelée aussi unité d’intérêt n’exige qu’une tragédie ne pose qu’un seul problème, en vue d’une seule solution. Elle existe dans le Cid, ma non dans Horace et Cinna.
Horace
L’action d’Horace est double, puisque le meurtrier de Camille, après las victoire, déclanche, après la victoire, une action toute nouvelle: a cela on pourrait répondre qu’il y a tout de même une seule action, parce que le vrai sujet est le dévouement de la gens Horatia à la patrie.
Cinna
L’action de Cinna est hésitante. L’intérêt va d’abord aux conjurés: à Emilie, à Cinna, à Maxime, puis il recule et il attend, avant de s’0orienter vers l’Empereur, à qui, enfin, il se donne tout entier. C’est au point qu’on s’est demandé parfois quel était le personnage héroïque de la tragédie. Ce ne peut être Cinna, sans convictions fermes; il est trop faible et trop amoureux; ce ne peut être Emilie puisqu’en fin de compte, son énergie est vaincue. C’est assurément Auguste, le sel personnage de la pièce qui fasse triompher sa volonté: il deviendra, au cours d’une lutte pathétique, un héros parfait. L’intérêt se déploie au second acte et il ne se fixe définitivement qu’au quatrième. C’est une faute contre les règles. Le sommet de la tragédie est atteint lorsque l’Empereur se décide à pardonner.
Polyeucte
La seule tragédie de Corneille absolument respectueuse des règles est Polyeucte (la prison du IV acte se trouve à l’intérieur du palais). Comme dans le Cid, elle contient des parties lyriques e surtout les stances du héros auxquelles il s’abandonne dans sa prison pour dire au revoir aux délices du monde en vue des délices célestes espérées. Cette partie lyrique est très dramatique e reste très liée à l’action, parce que c’est l’épisode d’un combat: Polyeucte a peur de céder à son amour pour Pauline, il demande au ciel un secours dont il a besoin tragiquement.
Conclusion
On pense qu’ Aristote n’a pas édicté les fameuses règles avec la rigueur qui terrifiait Corneille; on les doit surtout à Mairet e à Scudéry. De toute manière, les règles ont discipliné Corneille car elles ont obligé l’écrivain a concentrer l’action de ses drames et en faire une crise toute morale.