Breton, André - Surréalisme et Dadaïsme

Un recueil de vers datant de 1919, Mont de piété, montre un Breton qui

s’inspire du Symbolisme — d’abord de Mallarmé et ensuite de Rimbaud —

d’Apollinaire et de Jarry. L’année suivante, le père du Surréalisme rédige, avec

Soupault, une courte pièce, Vous m’oublierez, que le peintre Francis Picabia

(1879-1953) publie dans sa revue, «Cannibale», et qui sera représentée au

festival Dada. Très vite toutefois, l’écriture automatique et l’intérêt pour toutes

les manifestations de l’inconscient (rêves, visions sous hypnose) amènent un

vent de nouveauté qui dépasse largement la reproduction des symboles de la

modernité telle que l’a pratiquée Apollinaire; c’est ainsi que Clair de terre

s’ouvre sur cinq transcriptions de rêves. La littérature surréaliste a

définitivement rompu avec les techniques et les thèmes du passé.

Le monde des idées

Emprunté au jargon militaire, le mot «avant-garde» désigne désormais un

mouvement, un individu, une œuvre «qui joue ou prétend jouer un rôle de

précurseur, par ses audaces» (Petit Robert). C’est bien là ce qui a caractérisé

de nombreux artistes et écrivains au véritable passage du siècle, à l’époque de

la Première Guerre mondiale.

Dans un monde que les nouvelles techniques et l’industrie ont bouleversé,

l’avant-garde se met en quête d’un langage nouveau qui ne s’en tienne pas à

la description réaliste, voire naturaliste. Pour atteindre une expression

artistique résolument tournée vers le futur, il s’agit donc d’abolir d’abord tout

ce qui reste du passé: la tradition, l’imitation de la nature, les règles de

grammaire, la métrique. L’avant-garde comporte nécessairement une phase de

destruction qui précède la création; sans la table rase de Dada, par exemple, le

Surréalisme n’aurait pas eu sa raison d’être. Il eux a de même pour le

Futurisme, italien ou russe, qui a démoli avant de construire.

Fondée sur les théories du médecin viennois Sigmund Freud 1856-1939), la

psychanalyse attribue à l’inconscient une importance sans précédent. Si

l’interprétation des rêves (1900) est connue en France avant la Première

Guerre mondiale, ce n’est qu’à partir de 1920 que Freud formule trois notions-

ça,

clés, les instances qui gouvernent l’appareil psychique: le grand réservoir

d’énergie vitale, d’impulsions et de désirs, autrement dit l’inconscient; le

surmoi, principe d’autorité provenant des parents et intériorisé pour devenir

moi,

conscience morale; le intermédiaire entre des exigences qui s’opposent et

sur lequel se fonde par conséquent la personnalité consciente. Chaque acte,

verbal ou matériel, chaque rêve mérite d’être interprété car il révèle les

tensions secrètes — inconscientes — d’une existence, les désirs du a soumis à

la censure du surmoi. Dès 1898, Freud laisse ses patients exprimer routes les