Fabrizio Del Dongo
Genius
13 min
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Indice

  1. Présentation du sujet
  2. Le décor
  3. Les personnages
  4. L’action
  5. Les matériaux
  6. Signification

Présentation du sujet

Dans son œuvre (parue en 1957), l’écrivain reprend un certain nombre d’éléments qui appartiennent au roman traditionnel, mais utilisés d’une façon tout à fait différente. Il s’agit du décor, des personnages, de l’action, des matériaux. Tout en étant aussi conventionnels que possible, ils servent à l’auteur pour atteindre son but : refuser au roman tout prolongement vers une signification profonde extérieure à lui-même et empêchent au lecteur de s’engager dans une voie à la quelle il est habitué.
De préférence, Robbe-Grillet choisit toujours ses matériaux dans le domaine du roman populaire, du feuilleton (même s’ils sont méprisés), de la bande-dessinée ou du roman-photo. Sur cette base, le roman se développe, suivants ses propres règles.

Le décor

Nous ne savons pas dans quel pays l’action se passe. En tout cas, nous sommes dans un pays tropical et à ce propos il faut rappeler que Robbe-Grillet a fait de nombreux séjours en Guinée, à la Guadeloupe et la Martinique. Le lieu de l’action est plus précisément une maison coloniale, entourée de plantations de bananiers. Le narrateur ne quitte jamais cette maison qui constitue, donc, le seul décor du roman avec tout ce qui peut être vu par la fenêtre. Il n’en existe aucune description complète dans le roman, à la manière de Balzac; par contre, on trouve une grande quantité d’indications éparses, en fonction du déplacement du narrateur. Le décor est donc découvert par fragments, mais à la manière de quelqu’un qui s’y déplace et qui voit le dans les moindres détails. En récupérant tous les éléments dispersés, on peut reconstituer le plan de la maison. Il s’agit d’une maison en style coloniale, en bois, entourée d’une large terrasse couverte.
Les pièces sont pourvues de grandes baies munies, souvent, de jalousies, a travers lesquelles il est possible, selon l’orientation des lamelles, voir de l’extérieur ce qui se passe à l’intérieur.
Les bananeraies s’étendent sur toute la largeur de la vallée qui coupe un vaste plateau.
Le roman nous propose, donc un décor très conventionnel, puisque c’est aussi celui de nombreux romans populaires exotiques. Mais il est aussi vrai parce qu’il est précis et détaillé. Il s’impose avec la présence des choses réelles et, comme elles, leur absence de signification. Robbe-Grillet ne lui donne aucune signification, aucune valeur de symbole : le décor est là, tout simplement.

Les personnages

Il y a quatre personnages principaux, auxquels s’ajoute un certain nombre de comparses. Mais ils ne ressemblent pas à l’image du personnage du roman traditionnel. Dans le roman auquel on est habitué, chaque personnage a un nom, un prénom, a un caractère qui se reflète dans le passé et agit sur le présent. Donc, son caractère dicte ses actions et à chaque événement, le fait réagir d’une façon déterminée. Rien de tout cela dans La Jalousie. D’abord les personnages sont à peine nommés ou ils ne le sont pas du tout. Deux couples apparaissent dans le roman : le premier habite dans la maison coloniale ; la femme est à peine indiquée par l’initiale de son prénom et l’homme, (probablement son mari) n’est pas du tout nommé, car c’est le narrateur. Le second couple habite un peu plus loin, à la plantation avoisinante : Franck, sa femme Christiane et un enfant, qui n’apparaissent jamais directement, mais dont on parle parfois. Autres personnages : les domestiques noirs et les employés. Comme le décor, les personnages sont là, présent physiquement. Leur présence n’implique pas une signification, leur comportement n’est pas immédiatement révélateur d’un caractère.
Le narrateur ne fait pas d’analyses psychologiques, il se limite à observer et de décrire ce que font les autres dans le présent. Les occupations et les gestes sont ceux de la vie quotidienne, c’est-à-dire ceux que, d’habitude, les romanciers négligent parce qu’ils ne les considèrent pas significatifs : A. se brosse les cheveux, A. écrit une lettre, Franck, A. et le narrateur prennent l’apéritif sur la terrasse, etc…. Il n’y a aucune analyse psychologique. Le personnage du narrateur paraît plus complexe, mais de lui nous ne saurons que deux choses : il a un tempérament jaloux et il est plutôt raciste. Il est aussi d’un naturel très passif : il aime observer sans cesse, mais il intervient très peu.
En définitive, les personnages nous apparaissent comme des fantoches et leur rôle a la même importance que les objets ou que les animaux qui les entourent. Leurs actes aussi sont dépourvus de signification que ceux des animaux, leur immobilité très fréquente s’apparente à celle des objets.

L’action

Le mot « histoire » convient mal au roman de Robbe-Grillet. Une histoire suppose un début, une fin, une progression, donc, un déroulement dans le temps. Dans ce sens, il n’y a pas d’histoires dans le roman, mais il y a des événements, c’est-à-dire des histoires. Ces histoires n’ont pas de caractère achevé et elles ne comportent pas de morale ; au contraire, elles se présentent comme des fragments de réalité, comme des « instantanés » qui ne sont pas racontés, mais qui se produisent devant nos yeux en ce moment. Le narrateur se limite à s’en rendre compte et lorsqu’il cherche à les interpréter, il leur ajoute un sens que probablement, elles n’’ont pas.
Malgré cela, dans La Jalousie il y a une « trame ». L’intrigue, tout en étant floue, est visible.
Le narrateur, qui dirige une plantation de bananiers, forme un couple avec A., un couple mal uni ; elle utilise la grande chambre et lui, semble-t-il, une plus petite où est installé un lit à une place. La disposition des pièces de la maison, et surtout de la terrasse, facilite chez le narrateur le développement de son tempérament jaloux ; en effet, il observe, il épie A. dans les moindres de ses occupations et surtout quand elle est dans sa chambre en train de lire, écrire ou se coiffer. Franck dirige la plantation voisine et quand sa femme et son enfant tombent malades il se rend souvent sur la terrasse du narrateur et une certaine complicité s’instaure entre lui e A. À partir de ce moment-là, la jalousie du narrateur ne fait qu’augmenter, jusqu’à l’exaspération. Seulement à la fin du roman, son esprit semble se calmer.

Les matériaux

Somme toute, bien que l’intrigue ne soit pas racontée d’une façon linéaire, elle paraît solide et banale, à las fois. Ce n’est que l’éternel triangle le mari, la femme et l’amant et le récit se développe autour d’un sentiment de jalousie dans un cadre tropical. Toutes le conventions du cas sont présentes : A. est une belle femme oisive. Le planteur est toujours en short e porte une chemise en style colonial, le mari est jaloux, dans la nuit tropicale on entend les cris des animaux. Robbe-Grillet a choisi ses détail insignifiants juste à cause de leur caractère superficiel e conventionnel. On pourrait penser à Flaubert quand il écrit de vouloir bâtir quelque chose de rien, à propos de « Madame Bovary », pouvant se tenir tout seul, sans devoir s’appuyer sur quelque chose d’extérieur.

Signification

Si nous lisons un roman de Balzac, nous découvrons un narrateur qui raconte une histoire : il est partout, il connaît tout et il se transporte même dans la conscience des personnages. C’est l’exemple du romancier démiurge qui relate au lecteur une partie de tout ce qu’il sait et il est omniscient. Dans le roman moderne, le narrateur a perdu sa puissance et il a une connaissance fragmentaire des évènements. La Jalousie apporte à ce problème une solution tout à fait originale
L’œuvre coïncide exactement avec ce que dit le narrateur, c’est-à-dire avec le récit de ce qu’il voit et de ce qu’il fait. Il faut signaler que le narrateur ne n’exprime jamais à la première personne. Cela n’est pas possible sinon le lecteur serait amené à participer de plus près aux aventures du héros.
D’autre part, le « je » c’est une convention qui permet d’introduire l’analyse psychologique et Robbe-Grillet refuse cette convention. Le narrateur fonctionne comme une présence, comme un regard, il voit les autres personnages et tout est toujours vu par lui. Le roman est une suite d’images qui se forment sur la rétine du narrateur e de bruits qui sont perçus par ses oreilles. Il enregistre, mais il ne donne aucune interprétation de ce qu’il voit. Et le lecteur ne voit que par les yeux du narrateur.
Chaque passage descriptif ne correspond pas, comme dans le roman traditionnel, à un arrêt du récit pendant lequel l’écrivain prend du recul et il semble s’approcher pour décrire quelque chose. Un exemple : au début du roman le narrateur voit A entre dans la chambre; la technique choisie par l’écrivain permet de suivre les déplacements du narrateur qui, autrement, risqueraient d’apparaître une simple suite de descriptions. Lorsque le narrateur quitte la terrasse pour aller chercher de la glace, les indications sur la configuration des pièces désignent ses déplacements.

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